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            Saadi

Saadi vécut  à Chiraz, au XIIIe siècle.
Il est un des trois poètes — avec Ferdousi et Hâfiz — unanimement reconnus comme les plus grands de l'Iran. 
Il a porté au plus haut point de grâce et de délicatesse le ghazal d'amour, donnant aux plus subtiles idées la forme la plus simple et la plus éloquente. 
Dans l'exhorta­tion morale, la rédaction de sentences ou de proverbes, il réussit mieux que tout autre auteur de langue persane.

                    La caravane

O chamelier! va lentement! la paix de mon âme s'en va;
et ce cœur qui était le mien avec qui l'a ravi s'en va.
Je reste séparé de lui, infortuné, souffrant par lui;
et l'on dirait que loin de lui, une pointe en mes os pénètre.
Je dis : « Par ruse, incantation, je tiendrai cachée ma blessure »;
mais elle ne le reste pas : mon sang jusqu'à mon seuil s'en va.

Chamelier! retiens la litière! ne pousse point ta caravane!

d'amour de cet être élancé, l'on dirait que ma vie s'en va.

Je bois le fiel de l'abandon; mais lui nonchalamment s'en va;

ne vous enquérez plus de moi, mon cœur ne laisse point de 
trace.
L'être indompté s'en est allé, me laissant une vie pénible;
je ressemble au brûle-parfum, car la fumée sort de ma tête.
De par toute sa tyrannie et ses promesses non tenues,

je garde en moi son souvenir; ou bien sur ma langue il s'échappe.
Reviens! toi, plus cher que mes yeux, être charmeur et plein de  
grâce!
parce que mon trouble et mes cris vont de la terre jusqu'au ciel.
Sans sommeil du soir au matin, n'écoutant conseils de personne,
ainsi je m'en vais sans dessein; de ma main s'échappent les 
jours.
Patienter loin de l'être aimé, loin de qui possède mon cœur,
bien que ce ne soit mon affaire, j'y suis tout de même contraint
II est mainte façon de dire que la vie s'échappe du corps;
mais moi c'est de mes propres yeux que je vois s'en aller ma vie.